Quel avenir pour l’Apprentissage en Guyane à l’aube de la Réforme du gouvernement – réunion de concertation à l’initiative de la CTG

Le projet de loi visant à réformer l’apprentissage sera présenté fin avril 2018 en Conseil des Ministres. Ce vendredi 20 avril 2018, la Collectivité Territoriale de Guyane a souhaité réunir les acteurs intervenant sur cette compétence et ceux du monde économique afin d’engager une réflexion sur l’impact réel de ces mesures au niveau du territoire.
Dès l’introduction, l’enjeu est clairement annoncé par le Vice-Président Claude Plenet. Il s’agit de se concerter pour définir une ligne commune afin de défendre les intérêts locaux au regard des spécificités du contexte guyanais. Si nul ne remet en question la nécessité de réformer ce secteur, l’Exécutif de la CTG souhaite que soit saisie cette opportunité pour organiser, en amont, une réflexion pendant la période transitoire liée au processus du projet de loi. Anticiper, tel était l’esprit qui a été proposé aux partenaires et qui a animé la rencontre.

L’objectif de cette première rencontre était double. D’une part, elle fait figure de réunion d’information où un état des lieux de cette compétence et une analyse de la réforme ont été exposés aux différents acteurs présents, grâce à l’expertise ses services de la CTG. A la lumière de ces éléments, les regards des acteurs, dans leurs rôles et attributions, ont pu être croisés, chacun pouvant exprimer librement sa réalité professionnelle, ses appréhensions face à ce changement mais également ses pistes d’intervention.

Etaient présents les représentants de l’Etat dont le Secrétaire général pour les Affaires Régionales Philippe Loops, le Recteur Alain Ayong le Karma, les responsables de lieux de formations (IUT, CFA…) à l’instar d’Antoine Primerose, le Président de l’Université de Guyane, et les représentants des chefs d’entreprises.

Pour rappel, l’Etat a pour volonté de réviser les modalités organisationnelles du secteur de l’apprentissage. Les principaux changements sont le transfert de compétence, la modification de son mode de financement, une refonte des formations proposées sous le format de l’apprentissage et le financement des centres de formation d’apprentis. Si initialement, ce champ relève d’une compétence partagée, administrée essentiellement par l’État et les Régions, la réforme permettra une gouvernance assurée majoritairement par le monde professionnel.

Les 20 mesures dévoilées par le Premier Ministre Edouard Philippe ambitionne de positionner l’apprentissage en circuit d’excellence, renforçant son attractivité tant pour les entreprises que pour les jeunes, cible de ce dispositif (limite repoussée à 30 ans).

Cependant, des interrogations de fond restent. Se pose surtout la question de la recomposition des moyens financiers. Les Régions, qui géraient jusqu’à présent 1,6 milliard d’euros au titre de la taxe d’apprentissage, ne bénéficieront plus que de 250 millions d’euros, soit 5 % des ressources de la future “contribution alternance”.

La Guyane est un territoire dont le maillage économique est fragile. Son schéma micro-économique est formé essentiellement de T.P.E. En 2016, près 50% des entreprises sont des entreprises artisanales et plus de la majorité d’entre elles n’ont aucun salarié De plus, bon nombre des filières économiques sont en voie de professionnalisation, comme l’a rappelé le représentant de la DIECCTE.

Le contexte guyanais semble ainsi contre indiqué en l’état au déploiement efficace et serein de la réforme souhaitée par le gouvernement. La capacité de la CTG à faire levier deviendrai alors très limitée, d’où un impact financier à appréhender.

Or, les chiffres les plus récents (2016) montrent un important chômage représentant 23% des actifs en moyenne. Il touche principalement les jeunes actifs (44%), les anciens ouvriers (23%) et les non diplômés ayant au plus un CEP (35%). C’est en effet, au moins 40% des jeunes qui quittent le système scolaire sans diplôme et c’est environ 2200 jeunes qui ont décroché de leur scolarité en 2016.

Avec une population jeune en quête d’avenir, l’apprentissage s’avère être un dispositif incontournable pour répondre aux besoins en insertion de ce public. Raison suffisante pour la réflexion continue d’être menée par les différents acteurs, qui se sont tous accordés sur la question. Une prochaine rencontre aura lieu afin que des contributions puissent venir renforcer l’argumentaire exposé par la CTG.

 

Complément : Focus sur l’impact de la réforme de l’apprentissage en Guyane

 

Il est opéré un transfert des responsabilités des Régions vers les branches nationales et les opérateurs de compétence (Ex-OPCA).

L’apprentissage ne fera plus partie des compétences générales de la Collectivité territoriale. Elle pourra tout de même contribuer au financement des centres de formation des apprentis en fonction des besoins d’aménagement du territoire et du développement économique. Pour cela, elle disposera d’une dotation sur une enveloppe de 250M€ partagées entre les Régions de France et qui sera versée par l’Agence nationale France compétence, un organisme public de l’Etat qui est créé par la Réforme. Cependant les modalités d’attributions, au regard de sa démographie (et non pas de ces besoins) risque de ne pas avantager la Guyane, comme les autres départements ultramarins, selon le discours de l’association des Régions de France.

La CTG ne sera plus le financeur principal de l’apprentissage. Un rôle qui est désormais confié aux branches via un coût/contrat garanti. Les contrats seront financés selon une logique basée sur l’offre et la demande. Les contrats seront financés selon une logique basée sur l’offre et la demande.

Les CFA pourront ouvrir, « librement » et sans limite administrative, les formations correspondant aux besoins des entreprises.

Au regard de la réalité du tissu économique dont sa composition (TPE majoritairement), la question qui se pose : est ce que les filières sont en mesure d’assurer ce poids financier, localement ? En sachant, que la formation est qu’une étape car il s’agit également d’assurer l’insertion des personnes inscrites dans ce dispositif.

En termes d’opportunités proposées par la réforme, la signature de conventions d’objectifs et de moyens avec les branches permettra de renforcer le dialogue avec elles et les Opérateurs de compétences qui leur sont rattachées.

La Collectivité territoriale de Guyane continuera d’apporter son expertise. Cela malgré le fait qu’elle ne soit plus pilote de la compétence, et qu’à ce titre elle aura plus de difficulté à coupler cette politique publique avec son schéma de développement économique. D’autant que la gouvernance locale se verra organisée autour d’une commission où il n’est pas prévu actuellement qu’elle siège.

Des points restent à précise comme la date d’entrée en vigueur de cette nouvelle organisation. Les modalités de financement sont en attente, aussi bien pour la péréquation que pour le soutien à l’investissement et les contours de la nouvelle aide unique aux employeurs d’apprentis. L’évolution du statut juridique des CFA est également un des points soulevés où le gouvernement doit encore se positionner.